The author discusses trends in western societies that have contributed to the loss of interest in literary texts. Literary texts have fallen from their pedestal and have also disappeared from the French as a Foreign Language classroom. Teachers refrain from demanding more in-depth analyses of literary texts, because they feel they are too demanding for the students. However, there are ways of making students read and appreciate literary texts, from fairy tales for young readers to the novels for older students to familiarize them with other worlds and other cultures. Students should be encouraged to read, manipulate, rewrite and reinterpret the texts. This is not a sign of disrespect, but of the establishment of a personal relationship with the author and his text. (Ed.) | C’est par la poésie que nous avons appris la langue. C’est à partir de cette beauté sur notre peau que nous sommes entrés dans le vocabulaire, à notre insu. Cette situation où l’on comprend malgré soi. Nous ne savions plus dans quelle langue nous lisions. Cet état de perte, d’oubli. Où l’on oublie même quel est le vocabulaire que nous possédons pour comprendre. Cette beauté qui dépasse tout savoir. Nous comprenions ces poètes avant de comprendre la langue. La beauté rend les choses intelligibles. Par la beauté la Pentecôte a lieu. Nous étions petites encore lorsque nous nous faisions caresser, consoler par les mots. Une maman avec une voix très belle nous asseyait sur son grand lit et nous les offrait le soir en cadeau, le soir après l’école. C’est sur ce lit que nous avons appris la langue, en rentrant de l’école. Nous ne savions pas qu’un jour nous y puiserions tant d’énergie, une identité, un bonheur de vivre. Nous ne savions pas qu’un jour nous lirions jusqu’aux larmes. La beauté des mots est si grande, qu’elle contient même ceux qui ne les connaissent pas. Nada Moghaizel Nasr, Images écrites
Petite sociologie de la lecture d’œuvres littéraires en classe de langue
Depuis de nombreuses années, on entend dire – et on lit sous la plume d’universitaires et de journalistes sérieux – que les jeunes générations (que nous appellerons par commodité “les jeunes”), lisent de moins en moins et se détournent des grands textes littéraires – les textes canoniques - qui sont les monuments de notre Pensée (française? européenne? occidentale? judéo-chrétienne? Comment qualifier justement cette Pensée qui s’est illustrée par ses emprunts permanents à d’autres cultures, cette Pensée qui n’a eu de cesse de voyager et de “traverser les frontières”?). Un philosophe français, Alain Finkielkraut, homme de grande culture et de grande intelligence, y avait même vu une “Défaite de la Pensée”. La faute n’en revenait selon lui ni à Voltaire ni à Rousseau mais à cette propension très post-moderne des enseignants à mettre sur le même plan “tout et n’importe quoi”, le noble comme l’ignoble, Phèdre et Astérix, Molière et Tintin, Baudelaire et Renaud. Sans aucun discernement, sans aucune hiérarchisation des valeurs. La tentation de la suppression des hiérarchies n’est qu’une expression de la faillite des autorités de droit à laquelle sont confrontées nos sociétés occidentales développées. On l’a dit et répété, les autorités souffrent le martyr depuis que les nouvelles technologies de l’information et de la communication les ont mises dans une concurrence rude d’avec d’autres sources ou lieux d’information et de connaissance (et donc de pouvoir). Quand on observe le sort réservé aujourd’hui aux “Autorités” d’antan, force est de constater qu’à la maison les enfants n’hésitent pas à remettre en cause la parole du père, constamment “mise en perspective” par d’autres sources d’information et de connaissance. [...] |